Stimulants hormonaux : miracle économique ou catastrophe écologiq

Les stimulants hormonaux, notamment les hormones de croissance, sont largement utilisés dans l’élevage intensif pour augmenter la productivité. Bien que permettant d’accroître considérablement les rendements, leur usage soulève de sérieuses inquiétudes quant à leurs impacts sur l’environnement.

Sommaire

Usage répandu des stimulants hormonaux

Les stimulants hormonaux les plus couramment utilisés dans l’élevage intensif sont les hormones de croissance comme l’œstradiol, la testostérone et la progestérone. Administrées aux animaux d’élevage, principalement bovins, porcins et volailles, elles permettent d’augmenter rapidement leur croissance et leur production de viande ou de lait.Selon une étude de l’INRAE, 99% des bovins mâles et femelles destinés à la production de viande reçoivent des implants hormonaux aux États-Unis. Le recours à ces stimulants est également très répandu au Canada. En Europe, leur utilisation a été interdite depuis 1988, mais certains pays contournent l’interdiction.

Principaux stimulants hormonaux

Les hormones de croissance les plus couramment utilisées comme stimulateurs de croissance en élevage sont :

  • Œstrogènes :
    • 17β-œstradiol
    • Œstrone
  • Androgènes :
    • Testostérone
    • Boldénone
    • Trenbolone
  • Gestagènes :
    • Progestérone
    • Mélengestrol

Effets positifs sur les rendements

L’usage de ces hormones de synthèse en élevage a des effets spectaculaires sur les rendements. Une méta-analyse portant sur 64 études montre que les implants hormonaux permettent d’augmenter le gain moyen quotidien de poids vif de 15 à 30%.La productivité laitière des vaches traitées s’accroît également de 10 à 15%.

Au total, les hormones de croissance permettraient d’augmenter la production mondiale de viande de 10 à 15 millions de tonnes par an.

Impacts négatifs sur l’environnement

Cependant, l’utilisation intensive de ces stimulants hormonaux a également de lourdes conséquences écologiques.Tout d’abord, seule une partie de l’hormone administrée est utilisée par l’animal, le reste étant excrété. Or les stations d’épuration ne permettent pas d’éliminer totalement ces résidus hormonaux.

Une partie significative se retrouve donc dans l’environnement, notamment les milieux aquatiques.De plus, la viande issue des animaux traités contient également des résidus hormonaux qui se retrouvent dans notre alimentation. Bien que les doses auxquelles nous sommes exposés soient faibles, un effet cocktail avec d’autres perturbateurs endocriniens présents dans l’environnement n’est pas à exclure.

Enfin, en stimulant la croissance des animaux d’élevage, ces hormones augmentent indirectement la production de déjections animales, accentuant les problèmes de pollution azotée et phosphorée des sols et des eaux.

Perturbateurs endocriniens

Une fois rejetées dans l’environnement, même à faible dose, ces hormones de synthèse peuvent agir comme des perturbateurs endocriniens.

De nombreuses études en ecotoxicologie montrent qu’une exposition chronique à ces molécules est susceptible de provoquer des effets délétères sur la faune. Ainsi, l‘œstradiol et la progestérone ont été impliqués dans la féminisation de poissons mâles, entraînant une baisse de leur succès reproducteur.

Chez les alligators en Floride, des cas d’hermaphrodisme et de dysfonctionnement du système reproducteur ont également été reliés à la pollution hormonale.

Vers une interdiction des stimulants hormonaux ?

Face à ces impacts croissants, de plus en plus de voix s’élèvent pour réclamer l’interdiction totale des stimulants hormonaux en élevage, à l’image de l’Europe.Cependant, une interdiction brutale pourrait avoir des répercussions économiques majeures sur filière viande mondiale. Selon une étude commandée par l’US Farm Bureau, arrêter l’usage des hormones de croissance entraînerait une baisse de production de l’ordre de 5% aux États-Unis, soit l’équivalent de 4 milliards de dollars chaque année.Une solution intermédiaire pourrait être de n’autoriser ces stimulants hormonaux que sous certaines conditions strictes : limitation des doses administrées, contrôle systématique des résidus dans les aliments et les eaux, et interdiction pour les élevages situés dans les bassins versants les plus sensibles.Quoi qu’il en soit, il apparaît urgent de réévaluer l’usage intensif de ces substances au regard des preuves croissantes de leur impact environnemental. Leur interdiction progressive semble inéluctable à terme pour assurer la durabilité des filières d’élevage.

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